Une journée parmi d'autres...

Publié le par Maud

Voyager pour un moment sur un autre continent, ça fait souvent rêver, et pour cause ce n’est pas donné à tout le monde (même si je pense que quand on en a réellement envie, on peut s’en donner les moyens, dans mon cas c’est sûr c’est plus facile mais d’autres y arrivent aussi).

Mais voyager seule c’est encore différent, c’est « courageux » comme on me le dit souvent, mais je n’aime pas trop ce mot. La définition exacte du courage c’est : « Fermeté, force de caractère qui permet d'affronter le danger, la souffrance, les revers, les circonstances difficiles ». Pour moi, un voyage n’est rien de tout ça, mais peut-être que ceux qui me le disent se l’imaginent ainsi ?! Je me rappelle d’un élève qui avait donné cette définition : c’est « affronter ses peurs », et celle-là me correspondrait plus. La crainte de se retrouver dans un pays inconnu, face à une culture inconnue, avec des gens inconnus, parlant une langue inconnue. Mais pourquoi avoir peur de l’inconnu ? Non, je crois qu’il faut être curieux de ce que l’on ne connait pas. Moi, c’est plutôt le sentiment de solitude que j’ai toujours appréhendé, le fait de ne pas partager ce que je vis avec des gens qui me sont proches ou avec des gens tout court. Parce que même si on rencontre toujours quelqu’un sur la route, c’est souvent éphémère. On passe de très bons moments, plus ou moins longs et puis on se sépare. Et on recommence avec les suivants, ce qui est parfois fatiguant (quand on sait que ce ne sera que pour quelques heures seulement)... Il faut accepter que même les plus belles rencontres prennent fin. Chacun a son itinéraire, chaque voyage est différent. Il y a autant de voyages que de voyageurs, le meilleur étant celui qui nous correspond. Donc même si on en vit des bouts avec des gens que l’on croise, ça reste « notre » voyage, celui que l’on a choisi (pour ma part seule) et l’on est donc toujours seul(e) à le vivre. Bien sûr, c’est aussi un avantage : être seule pour décider où je vais, ce que je fais, quand et comment. Sentiments de liberté et d’indépendance que j’aime. J’ai appris à vivre avec moi-même depuis quelques mois maintenant et ça ne se passe pas trop mal ! Mais parfois, un peu d’aide serait la bienvenue ! D’un autre côté, je vois aussi réellement la nécessité si on part à plusieurs, de voyager avec des personnes qui ont les mêmes envies que soi, le regret et les frustrations étant à mon avis le pire dans un voyage…

 

L’année dernière à Cusco, je n’ai jamais ressenti de réel manque de la France. Je m’étais créé un nouveau quotidien, j’avais des amis, un travail… Et ça a été très dur de quitter tout ça.

Cette fois c’est différent. Je suis contente d’être ici, j’aime voyager, parler d’autres langues, découvrir de nouveaux paysages chaque jour, rencontrer des gens différents, me retrouver dans le bus sans trop savoir où je vais arriver. Mais je n’ai pas d’attaches, je reste rarement plus de 2-3 nuits à un même endroit et pendant les moments que je passe seule, j’ai plus de temps pour réfléchir, ce qui n’est pas toujours bon. Et forcément, je pense plus à ma vie en France !

 

Le voyage a un point commun avec la routine de tous les jours, c’est une succession de journées plus ou moins bonnes, desquelles il faut toujours essayer de faire sortir le positif. Bien sûr, je fais des choses qui ne ressemblent pas au quotidien classique et ma vie n’est pas réellement une routine, mais ce n’est pas pour ça que chaque journée est merveilleuse et fantastique. C’est peut-être difficile à croire et je ne cherche pas à ce que l’on me plaigne. Je veux juste vous faire partager un peu de mon quotidien et ces moments, même s’ils sont rares et finalement pas si terribles quand j’y repense après, font partie de ce que je vis. Voici l’un d’entre eux…

 

Ce matin, réveil à 9h pour rendre la chambre de l’auberge. Ce n’est pas si tôt mais j’aurais bien dormi un peu plus. Ça fait plus d’une semaine que je me lève très tôt tous les matins, que j’enchaîne les bus et les randos ces derniers jours. J’ai l’impression de courir après le temps et l’Argentine c’est cher et grand ! Et deux longues journées pas folichonnes m’attendent... Ce soir, je prends un 1er bus à 19h30 pour retourner à El Calafate. Puis je vais attendre au terminal de 22h30 à 3h du matin le 2ème bus (qui arrivera à 7h à Rio Gallegos). Et enfin, j’en prendrai un 3ème à 9h pour arriver vers 21h à Ushuaia, le bout du monde se mérite ! Grosse grosse pluie au réveil, je pensais profiter de cette dernière journée dans le parc des glaciers pour faire une dernière rando mais là ça donne vraiment pas envie. J’ai déjà pris la pluie les jours précédents et je préfère rester sèche pour prendre les bus. Du coup, je passe le temps sur internet. Je me rappelle que l’on m’avait donné un nom de compagnie pour des vols moins chers. Par curiosité, je regarde. J’avais déjà vérifié sur d’autres et c’était vraiment plus cher que le bus. Mais là, je trouve un vol El Calafate - Ushuaia moins cher. Petit coup de déprime, j’aurais pu économiser de l’argent, du temps et de la fatigue si j’avais regardé plus tôt, je m’en veux et je suis la seule à qui je peux en vouloir… Alors avec le temps pourri, la connexion skype avec mes parents qui ne marche pas, celle moyennement réussie avec ma sœur la veille, et 2 jours passés à marcher avec des gens super sympas… C’est dur de se retrouver seule dans sa galère, aussi petite soit-elle, et donc petit coup de blues. Je me surprends à me dire que j’aimerais être en France là maintenant. En plus de ça, un gros groupe de français de 60 ans est arrivé et ils se parlent fort comme s’ils étaient tout seuls, font leurs petits commentaires, se racontent comme ce n'est pas toujours facile de voyager à plusieurs... C'est pas la première fois que j'en vois des comme ça ! Mais là je ne peux pas aller ailleurs et même la musique dans les écouteurs ne les couvre pas, ça me soule. J’ai vu mieux comme début de journée !

Bon, après coup j’essaie de me rassurer en me disant que finalement si on ajoute les taxis vers les aéroports et la nuit d’hôtel que j’aurais dû payer, l’avion m’aurait couté le même prix que le bus, voire un petit peu plus. C’est déjà ça, en ce moment toutes les économies sont bonnes à prendre, vu le coût de la vie, des transports et des visites ici… Je passe un peu de temps à parler avec des amis sur internet, ça me change les idées. Je reçois un message d’une amie bénévole de Yanapay tout gentil, ça fait du bien dans ce genre de moment ! 

Et puis dans l’aprèm le temps se calme, alors je décide de me balader jusqu’à un mirador. Ils disent 2h pour faire l’aller-retour, je ne dois pas trainer…

En montant au mirador, mes mollets me font mal mais pas le temps de faire une pause. La pluie s’arrête presque, ça s’éclaircit un petit peu. Qui l’aurait cru ! Arrivée en haut, très belle vue sur la pampa patagonienne, le lac Viedma et les montagnes en fond. Si j’avais pris l’avion, je n’aurais pas vu ça... Et belle surprise en redescendant, un condor vole au-dessus de moi et est rejoint par trois autres. Ils sont hauts, mais quand même je suis là en Patagonie à me promener sous des condors. A ce moment-là, j’ai eu une grosse pensée pour Aurélie et Stéphane qui m’ont souvent dit que les choses n’arrivaient pas par hasard. Et sans que le destin n’existe, la vie est juste bien faite et les choses arrivent au moment où on en a besoin. Cette journée qui avait donc mal commencée, s’est bien terminée et il y a même du positif au final. Jusqu’à l’attente dans le terminal jusqu’à 3h du matin : une cafétéria qui devait fermer vers 23h-0h est en fait restée ouverte jusqu’à ce que je prenne mon bus (c’était samedi soir et il y avait de gros clients !), ce qui m’a évité d’attendre sur un banc toute seule dans le froid. A défaut d’avoir à manger (j’avais pas eu le temps d’acheter quelque chose entre la rando et le premier bus), j’ai au moins pu boire un thé !

Comme quoi, le bonheur ne tient parfois pas à grand-chose.

 

Quand je relis ce que j’ai écrit à la suite de cette journée, je me dis que finalement y’avait vraiment rien de dramatique et j’ai hésité à le publier. Mais je ne sais pas pourquoi, sur le coup, ça a été un des moments les plus durs et où je me suis sentie le plus seule. Sans doute l’accumulation de pleins de petites choses qui ont amplifié ce que je ressentais... Alors j’ai eu envie de m’en rappeler et de me rappeler aussi qu’il peut y avoir du positif même dans les moments où ça va moins bien (que ce soit ici ou en France surtout) et que la vie est (généralement) bien faite, il faut lui faire confiance ! Et profiter des bons moments parce qu’on ne sait jamais combien de temps ils vont durer.

Ceux que je connais ou que j’ai rencontrés qui ont vécu des moments vraiment durs savent bien plus que les autres comment il faut savourer chaque journée que la vie nous offre.

 

Publié dans Voyage 2012

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F
Ah, que j'aime cet article :)<br /> Rentrer dans le détail d'une de tes journées, avec ces bonnes et moins bonnes choses, découvrir un pays, des paysages, des rencontres, des anecdotes... au travers de ton blog, c'est déjà génial !<br /> Mais un peu de toi dans tout ça, comprendre comment tu le vis, ça fait aussi plaisir :) Surtout pour en tirer quelque chose d'aussi positif ;)<br /> <br /> Je te comprends bien, surtout pour avoir un peu participer à ce que tu racontes^^ Skype nous sourira peut-être + une prochaine fois ;)<br /> <br /> Je t'embrasse bien fort ma grande soeur, bon bénévolat près de Jujuy, profites encore et toujours, et à très vite
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